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5^ HENRI HIGNARD n'est pas dimanche que tu l'aurais reçue, mais le jeudi d'auparavant. De plus, j'étais accablé d'ouvrage, comme je le suis encore, comme je le serai probablement toute cette année ; et malgré tout mon regret, je' t'ai laissé attendre quelques jours, jusqu'à ce que tu eusses reçu la lettre de Mrae Bonnardet. Je gémis d'avance lorsque je pense combien j'aurai à faire cette année, et combien j'aurai peu de temps à te donner, moi qui voudrais t'en donner tant, mais au moins j'emploierai bien ce qui me restera, et j'espère bien te prouver, si tu pouvais en douter encore, que rien au monde ne m'est plus cher que toi, et que personne ne possède à un pareil degré toute mon amitié. Dans ma lettre je te recommandais de m'écrire des lettres longues ; il est vrai que tu ne l'avais pas encore reçue lors- que tu m'as écrit la tienne ; mais dis-moi un peu à quoi tu as pensé de m'envoyer ainsi douze lignes ? Toute lettre de toi, quelque petite qu'elle soit, m'est toujours précieuse; parce que dans toutes je vois ton amitié; cependant, sache- le bien, j'aime beaucoup mieux celles qui sont longues. Les autres sont trop tôt lues ; elles n'occupent pas assez : au contraire lorsque j'ai lu une lettre de quatre pages, j'ai l'esprit content, je me fais presque illusion sur l'absence, et je me persuade en quelque sorte que je sors d'une lon- gue conversation avec la personne aimée qui me l'a écrite. Je t'en prie, donne-moi souvent ce bonheur. Tout ce qui a rapport à toi m'intéresse à un si haut degré, que je vou- drais tout connaître dans les plus longs détails. Ces vacances j'avais l'esprit assez troublé ; j'ai dû te paraître souvent bien froid, mais crois-le, sous cette apparence trompeuse, il y avait un cœur bien chaud et bien aimant, et la plus grande pan en était à toi.