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122            UNE PAGE DE LA VIE LYONNAISE

et modela les traits idéalisés de l'enfant qu'elle pleu-
rait (15). »
   Mme de Sermézy parlait peu ; sa taille était haute et
élancée ; c'était une femme bonne et généreuse, aux
manières froides et réservées ; avant tout passionnée pour
son art, elle cherchait plus encore à reproduire dans ses
œuvres l'expression des sentiments de l'âme que la réalité
matérielle des traits.
   Un des assidus de son salon nous fait connaître le soin
ingénieux qu'elle prenait pour animer ses modèles :

   « Mmc de Sermézy entreprit de modeler mon buste (16),
pendant que Mme Récamier venait chez elle pour donner,
disait-elle, plus d'animation à ma physionomie. — Si cette
cause fut un moyen de succès, le fait est que ce portrait
réussit très bien, le modèle et la ressemblance ne laissent
rien à désirer.
   « Mais revenons à Mme Récamier, continue notre vieux
narrateur ; je voyais souvent chez elle un philosophe très
célèbre aujourd'hui, Ballanche, le bon Ballanche, ainsi
qu'on le nommait en le plaisantant sur son assiduité auprès
d'une jolie femme à la mode, — lui qui faisait si peu de
cas des femmes et de la mode. — Mais c'était l'esprit et le
jugement de cette femme qui sympathisaient avec lui; et
depuis lors son assiduité auprès d'elle a toujours été cons-
tante. — Ses goûts et le peu d'usage qu'il avait du monde
auraient pu servir alors à appuyer mon opinion sur ce qui
arrête le développement du génie ; car si Ballanche a su


   (15) M» e Lenormant : Souvenirs et correspondance de M m e Récamier,
t. I " , p. 192.
   (16) Souvenirs manuscrits de Fleury Richard, peintre lyonnais, p. 100.