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334 L'INDUSTRIE DE LA SOIE Les idées qu'éveille l'observation réfléchie des œuvres d'autrefois conduisent, non pas à des répétitions sans honneur et sans profit, mais à de véritables créations soit pour la contexture soit pour la décoration ou la couleur. Les intelligents et les habiles savent le prix de ces reliques du passé ; ils savent aussi qu'elles ne valent qu'en associant ces exemples aux formes et aux traits nouveaux et singuliers qui abondent dans le grand fonds de la nature. On est loin d'avoir épuisé les ressources qu'offre à l'industrie contemporaine et cette flore pour laquelle il y a tant d'interprétations également origi- nales, dont la diversité encore en partie inconnue est si attrayante, et l'art ancien de l'Asie dont la science, la fantaisie et la libre conception nous confondent. L'art du tissage a grandi lentement à Lyon, en pré- sence de la rivalité écrasante des fabriques italiennes, entravé par les marchands italiens, malgré des obstacles sans nombre. Il est assez difficile d'en juger, parce que « l'art et artifice des draps de soye », comme on disait alors, a eu des fortunes diverses. Cependant on peut se faire une idée de l'état des choses. Lors de l'entrée de Henri II à Lyon, en 1548, on voyait dans le cortège quatre cent cinquante-neuf tissutiers, vêtus « de velours blanc et noir tout passementé et pourfilé d'or. » En 1575, les maîtres du métier ont dressé pour le Consulat le rôle de tous les ouvriers (c'étaient les maîtres) ; on ne comptait que douze fileurs de soie (mouliniers) ; cent soixante-un veloutiers, trente taffetatiers et seize teinturiers de soie. Le nombre est bien petit, mais les temps étaient troublés. Néanmoins la manufacture gran- dissait, s'ouvrant sa propre voie. La consommation en favorisait les progrès. « La dissipation des draps d'or,