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314 MOREL DE VOLEINE bien encore quelques amateurs comme Messieurs et votre serviteur : race de flâneurs et de vieux enfants pour qui une tirade de marionnette, bien débitée, renferme plus de philosophie et plus de bon sens que les gros ouvrages de MM. les professeurs de l'Université. » Hélas ! le vrai théâtre de Guignol a disparu, lui aussi ; les adaptations d'opéras, de poésies et de pièces modernes l'ont tué. Les masques de Guignol, du traître Gnafron, du père Coquard, de la belle Madelon ont été remplacés par des tètes de nègres, de coiffeurs et de ballerines. Les savants directeurs de nos Musées, chargés de rassembler, au profit de l'Exposition de 1894, les épaves du Lyon ancien, seront obligés de secouer la poussière des bric-à - brac, pour en exhumer ces naïfs fantoches. Cependant, les vrais Lyonnais se plaisent encore à incarner, dans la plaisante figure de Guignol, les types, les originalités, les mœurs, les traits, les saillies et les gandoises du crû, auxquels le langage pittoresque et l'accent expressif des naturels de h Grand'Côte et du Gourguillon ajoutent une saveur particulière et un goût de terroir sans rival. Tout cela se retrouve dans le JOURNAL DE G U I - GNOL, fondé en 1865, par M. Esprit, sous l'influence, dit-on, de M. de Saint-Priest, feuille légitimiste et sati- rique, à reflets vifs, mais intermittents, dont les rigueurs administratives éteignirent bien souvent les feux. Des articles originaux, en patois lyonnais, et des portraits plus ou moins figurés, sous lesquels la malignité publique mettat des noms connus, ont fait la fortune de cette publication. Selon le temps, le Comité de rédaction conférait, sous les arbres deBellecour, transformés en jardins d'Academus, ou bien dans l'officine du pharmacien Simon, qui avec un