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164 GUY DE CHAULIAC cette place. Lorsqu'en 1584 Laurent Joubert, professeur à l'École de Montpellier, voulut donner une édition définitive des œuvres du maître, le texte primitif traduit et commenté, copié et imprimé pendant trois siècles consécutifs, était devenu presque incompréhensible. Il dut recourir à un manuscrit original, précieusement conservé à la Faculté, pour en donner une version correcte, et cette dernière fut encore réimprimée huit ou dix fois et traduite dans toutes les langues de l'Europe. De tous ces détails il est permis de conclure que Guy de Chauliac fut un des hommes les plus remarquables de son temps, de ce xive siècle plein de promesses à ses débuts, si cruellement déçues par la suite. A considérer les progrès des Lettres et des Sciences tant en France qu'en Italie, on pouvait se croire à la veille de la Renaissance. Il ne devait pas en être ainsi. L'ordre de succession des royautés du moyen âge, fondé sur un sentiment peut-être exagéré de l'hérédité et sur la * foi profonde des races germaniques dans les droits absolus du sang, déchaîna sur l'Occident une des tempêtes les plus affreuses dont l'histoire nous ait gardé le souvenir. Pendant un siècle entier la France et l'Angleterre s'épuisèrent dans une guerre acharnée dont les conséquences désastreuses se firent sentir bien au-delà des frontières des deux pays et retardèrent de cent ans au moins les progrès de la civilisa- tion en Occident. Après nos premiers désastres et le démembrement du royaume qui en fut la conséquence, les troupes mercenaires des deux partis rendues à la liberté ne recevant plus leur solde, s'organisèrent en Grandes Compagnies et exercèrent sur les malheureuses provinces restées à la couronne le pillage et la dévastation. La France d'un bout à l'autre de