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                             « LOUISE »           .        95

mieux, vous risquez de sombrer dans la médiocrité ou
l'à-peu-près.
   Les considérations qui précèdent sont pour ainsi dire les
scolies de l'Å“uvre de M. Charles Fuster, l'histoire de sa
genèse esthétique ; elles mettent en lumière son vrai
mérite d'artiste convaincu, elles affirment, en sa personne,
le développement et l'épanouissement de Yingenium poeticum
dont parlait Quintilien.


                                  II

   Ce roman poétique est une histoire d'amour qui se
déroule dans les montagnes du Jura, pendant le terrible et
sanglant hiver de 1870.
   Louise et sa mère, au début du volume, veillent dans
leur maison solitaire, en pensant aux pauvres soldats blessés.
Les deux femmes s'aiment tendrement. La mère, résignée
et douce, veuve de bonne heure, entoure sa fille d'une
affection profonde et un peu inquiète, car celle-ci, âme
enthousiaste, se plaît aux rêves indécis. A vivre ainsi, la
réalité effraie et tente peu. Louise l'éprouve bien vite.
A force de lire et de relire les poètes qui ornent sa biblio-
thèque, elle en est arrivée à bâtir dans son cœur « le temple
lointain et sacré » dont nous parla jadis Mme Darmes-
teter (1), et où l'Idéal et l'Imprévu sont ses dieux avérés.
Et c'est ainsi qu'elle passe auprès de Pierre, bon et brave
gars, au cœur honnête, sans pouvoir l'aimer, car :

                    Pierre n'est pas poète, hélas !



  (1) Cf. The Idéal. Italian Garden, II.