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8o LES SAVANTS LYONNAIS M r Voltaire s'est mis sur les rangs pour obtenir dans l'Aca- démie Française la place vacquante par Mgr le cardinal Fleury, et ce qui afflige le plus c'est qu'il se dit favorisé du roi pour la recherche de cette place. Nous étions si joyeux que Mr de la Bletrie ait été rejeté du roi pour avoir appelé de la Bulle, les jansénistes ont vu par là ce qu'ils doivent craindre du zèle de Sa Majesté, et nous ce que nous devons en espérer. Mais quelle douleur de ne voir rebuter un jan- séniste, ou un homme suspect de l'être, que pour lui voir substituer un mécréant? « Mr Voltaire est encore in reatu, un arrêt dont il ne s'est jamais lavé a condamné aux flammes ses Lettres philoso- phiques remplies de l'esprit séditieux et de l'irréligion des Anglais, l'impie lettre à Uranie dont le public persiste à le charger, et ses discours libertins qui ont corrompu tant de femmes et de jeunes gens l'ont rendu abominable aux per- sonnes qui connaissent et respectent la religion, et ce sera un tel homme qui paraîtra aux yeux de tout le Royaume muni de la protection de Sa Majesté. Pesez-en, Monseigneur, les conséquences. « Déjà le jansénisme a fait des ravages bien déplorables et on ne peut être trop attentif à les arrêter et à les réparer mais j'ose dire que ceux du libertinage d'esprit qui gagnent à vue d'œil ne méritent pas moins les soins d'un roi très chrétien, et que si l'on couronne ce libertinage au lieu de le punir, ses progrès n'auront plus de bornes. « On dit que ce qui fait pencher le roi pour ce choix, c'est que personne n'est plus capable que Voltaire de répandre sur les cendres de Monseigneur le cardinal les fleurs que ce digne ministre mérite. Mais un Prélat si religieux pendant sa vie et à la mort peut-il être loué convenable-, ment par une bouche accoutumée au blasphème? Je suis