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D'APRÈS M. CHARLES MAURRAS 17 « Tisseur, le plus jeune ( i ) , s'était fait prêtre et s'employait « à des œuvres d'érudition. « Jean Tisseur a glorifié son pays par sa vie comme son « frère aîné l'avait fait par sa mort. Il fut pendant trente « ans secrétaire de la Chambre de Commerce; pendant « trente ans il s'adonna à des recherches de prosodie, à des « contextures des formes dont le résultat était de « para- « lyser les coups d'aile », comme l'a reconnu un jeune « Lyonnais qui a écrit sur ces matières, M. Paul Mariéton. « Mais, de peur d'être injuste, il faut considérer quelle « sorte d'esprit devait conduire Jean Tisseur dans ses m é - « ditations de la mécanique du vers. C'était là encore et « toujours l'esprit lyonnais. A Lyon seulement, s'il faut « croire le témoignage des Celto-Galates, se trouvent des « mécaniciens, des industriels, des marchands, des ouvriers, « qui soient animés du souffle mystique et qui nomment « encore leur œuvre ou leur trafic un art. Jean Tisseur ne « crut pas que l'art des vers fût très supérieur à celui de « tisser des pièces de soie. Rien d'ailleurs, à ses yeux, ne « pouvait vaincre en excellence la noble occupation sécu- « laire des Lyonnais; il y savait réduire ou subordonner « tout ce qui peut se voir dans la nature et la vie humaine. « La plupart des autres nations, après avoir nommé tous « les objets sensibles, ont conçu l'objet invisible qui les (1) Il y a ici une légère erreur. Alexandre était le troisième des frères et Clair le plus jeune. Alexandre Tisseur n'a pas laissé d'oeuvres d'éru- dition, mais trois Pèlerinages littéraires, exquis en leur genre. Il a laissé aussi la matière d'un volume de vers, pleins de souffle, parfois très beaux, mais qui appartiennent plus à la famille des vers de Barthélémy qu'à la famille de ceux de Jean. Soit extrême modestie, soit amour de la vie cachée, il a interdit la publication de ses vers. N° 1. — Juillet 1893 2