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EN OISANS 20 r ,Derrière nous la vue s'étend déjà : la Grande Aiguille, l'EncouIa, Clot-Châtel, la pointe des Etages élancée comme le Cervin, les Rouies qui ressortent en blanc sur de gros nuages couleur d'encre, le pic d'Olan, tout noir dans le lointain, font un décor funèbre qui semble être le vesti- bule de quelque terrible nuit de Walpurgis. Mais entre les nuées délavées comme une aquarelle qu'on aurait exposée à la pluie, un rayon de soleil, pâle, mal réveillé, vient frapper ces cîmes lugubres et voici qu'elles deviennent radieuses!... Hélas, c'est une fausse alerte : Phébus a mis le nez dehors, il a trouvé le temps trop laid, trop mâchuré; vite, il a refermé la fenêtre. « Nous avons fait notre course, dit le guide, il ne reste plus qu'à revenir. » Nous le regardons, navrés, pour voir dans ses yeux si vraiment il n'y a plus d'espoir. Il devine notre pensée : « Ah ! Messieurs, nous dit-il, n'attaquons pas les Ecrins avec le brouillard et la neige !... car il neige là -haut, et fortement ! Il disait vrai : dans le nuage, une main invisible semblait saupoudrer de blanc les rochers ; peu après, la poussière blanche la neige arriva jusqu'à nous, assez drue et nous fouettant la figure. A ce moment, nous atteignons le haut du glacier et mettons le pied sur le col des Avalanches (3,611 mètres). C'est une vue qui nous fait froid au cœur, que celle plongeant par le col glacial et étroit, entre les deux parois de rochers verglassés qui se fondent à quelques mètres au dessus dans le brouillard opaque. Le glacier noir apparaît là -bas à mille mètres de profondeur ! Nous approchons avec précaution au bord de ce terrible couloir de neige que l'œil ne peut suivre jusqu'au bas de