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                         EN OISANS                       135

   Certes, le Campement de Castëlnau n'est pas gai ! Ce mot
 de campement, qui a toujours évoqué une idée de repos et
de jouissance calme après la fatigue, ne présente ici à l'es-
prit qu'une vision dantesque, celle de trois hommes
accroupis sur une dalle étroite, brûlés par un froid de onze
degrés au-dessous de zéro, et dans la nuit noire forcés de
lutter contre le sommeil sous peine de ne pas se réveiller.
Ce n'est jamais sans un air grave et sans une profonde émo-
tion que Gaspard parle de cette veillée horrible qu'il passa
là, il y a douze ans, avec M. de Castëlnau et Pierre, les
vêtements recouverts d'une couche de glace (car il avait
plu dans la soirée), et sans autre nourriture qu'un petit
flacon de cognac.
   Du Campement de Castëlnau on suit une corniche qui
court à droite vers le Glacier Carré. Mais il est à une belle
hauteur, à 175 mètres environ, au faîte d'une muraille
noircie, ce glacier qu'il faut atteindre à tout prix. Sa frange
de stalactites, dentelle aérienne que nous apercevons verti-
calement au-dessus de nos têtes, nous menace comme une
rangée d'épées de Damoclès.
   La « route » est barrée, il faut revenir à l'ouest jusqu'à
l'arête, parmi des difficultés toujours croissantes. On
 domine alors le Campement de Castëlnau. Une heure s'est
écoulée depuis que nous l'avons quitté, et nous ne sommes
 qu'à une trentaine de mètres au-dessus en perpendiculaire.
    Encore une longue heure sur l'arête elle-même et nous
 atteignons le fameux Pas du Chat.
    Le Pas du Chat est excessivement intéressant, mais je le
 crois plus difficile à décrire qu'à traverser. On y accède par
 une marche de flanc sur une corniche qui va en s'amin-
 cissant et se transforme en une simple fente horizontale.
    Figurez-vous être à mi-hauteur d'une énorme tour que