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248 U\T ÉPISODE LYONNAIS Qu'était devenu, au milieu du désastre de son armée, le général en chef, Louis de Châlon ? Paradin va nous l'apprendre. « Finablement le prince d'Orange, chef de l'entreprise, voyant ses gens rompus, se voulant sauver et se voyant poursuivi à toute bride de ses ennemis, piqua au Rhône, rivière des plus impétueuses d'Europe. Ce nonobstant, le prince, se sentant monté sur un coursier hardy et coura- geux, d'une haute balme de ladite rivière du Rhône poussa son cheval, lequel, saillant dedans d'un grand cœur, nagea à travers du Rhône, avec son maître armé de toutes pièces, et le porta à l'autre rive, à sauveté. Qui fut chose admirable; car il ne fut jamais ouï que homme ait fait cet acte. Les Français, étant sur le bord de l'eau, eurent le plaisir de ce spectacle, car ils n'avaient pas été si fols que de piquer après (15). » On dit qu'une fois sur la terre bressanne, le prince des- cendit de son cheval, se mit à genoux devant lui et lui baisa les pieds en l'appelant son libérateur et en lui promettant de le nourrir, tant qu'il vivrait, sans jamais plus le monter (16). (15) Paradin. Annales de Bourgogne, p. 719. Un autre chroniqueur affirme que le prince trancha d'un coup de sabre le bras de son écuyer, au moment où celui-ci, qui s'était jeté à l'eau, saisissait, pour essayer de se sauver, la queue du cheval de son maître. (Portcet. Essai histo- rique, p. 60). Il nous a été dit que dernièrement des mariniers reti- rèrent du Rhône, près d'Anthon, une vieille épée armoriée. Ne serait-ce pas celle du prince qui lui aurait échappé des mains au moment où il frappait son serviteur ? (16) Chorier trouve à redire a la conduite du prince : « On blâme Caton le censeur, que T. Live loue comme le plus grand homme de son temps, de ce qu'étant de retour de son gouvernement d'Espagne,