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78 UN ÉPISODE LYONNAIS recueilli que des lambeaux de l'héritage de ses pères. En vertu du traité de Troyes, c'était le jeune Henri VI d'An- gleterre qui était roi de France et de fait, les Anglais, sui- vant le mot d'Olivier de la Marche, « possessoyaient et sei- gneurisaient Paris et le plus beau du royaume de France (4).» Le désir de venger la mort de Jean-sans-Peur, assassiné à Montereau, avait fait du nouveau duc de Bourgogne, Philippe le Bon, alors le plus puissant prince d'Europe, leur intime allié. Quant à l'héritier légitime de la Couronne de France, il ne voyait son autorité reconnue que par quelques provinces du centre ou du midi. D'un caractère faible, et cependant beaucoup moins indolent et adonné au plaisir qu'on ne l'a cru jusqu'ici, Charles était loin de prendre gaîment son parti de la perte de son royaume. Mais autant il avait fait d'efforts pendant sa régence et depuis son règne, pour relever les affaires de l'Etat, autant il avait essuyé d'échecs. Ses ennemis l'appelaient ironique- ment « le Roi de Bourges » et, soit à cause de sa détresse, soit parce que l'onction sainte, que les Rois de France ne recevaient qu'à Reims, lui manquait encore, ses meilleurs sujets n'osaient eux-mêmes lui donner d'autre titre que celui de « daulphin de Viennois » ou de « régent du royaume ». Dans le tableau qu'ils nous présentent de cette désas- treuse époque, beaucoup d'historiens s'attachent exclusi- vement à rapporter les événements dont la capitale et les (4) Mémoires, chap. III. « ... les Anglais seigneuriaient et posses- soiaient la cité de Paris et le plus beau du royaume de France ; et se retrait le roy en la cité de Bourges en Berry, par delà la rivière de Loire, laquelle cité un soudoyer bourgongnon, nommé Pernet Grasset, tenait en apactis le roy étant dedans. »