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                          LAMARTINE                        3 27

    L'Hymne de la raison, c'est bien cela. Il n'y a rien de
 plus dans toute la pièce ; il n'y a, en fait de doctrine, rien
 de plus dans tout le recueil, et l'œuvre dut à ce caractère,
 je le répète, la meilleure part de son succès immédiat.
 Dans le chœur d'acclamations qu'elle souleva, l'orgueil
philosophique tenait son rôle, qui était celui du coryphée.
    Pour tant de bruit, ce langage était-il donc en France
quelque chose de si nouveau ? Infiniment plus qu'on ne
 serait porté jà le penser. Par lui, le poète donnait leur for-
mule à des temps qui venaient de naître, et cette formule
était nouvelle, comme ces temps étaient nouveaux. Jusqu'au
xviue siècle, la doctrine chrétienne avait résolu pour nos
pères le grand et terrible problème de la destinée humaine ;
s'ils avaient fait de la philosophie païenne avec Montaigne
et Descartes, ce n'avait été qu'en manière d'exercice et de
passe-temps : on mettait à part les principes de la foi, on
les réservait, et on les réservait si bien qu'on les retrouvait
toujours au moment de mourir. Avec le xvme siècle com-
mencèrent les vraies recherches, au moyen desquelles il
s'agissait de remplacer réellement renseignement chrétien.
Ce malheureux siècle s'y consuma sans succès ; il est vrai
qu'il agitait le problème avec le désir de le trouver insoluble,
et pour pouvoir conclure avec Voltaire, dans Candide, que
tout n'est qu'inégalité, injustice, incohérence et dérision.
    Rousseau seul avait repris hautement la solution du spiri-
tualisme antique ; mais sa philosophie inconséquente dis-
parut et se perdit au milieu du sensualisme théorique et pra-
tique des dernières années du siècle. On en trouve à peine
un rappel ridicule au fronton des églises, dans la fameuse
profession de foi que son disciple Robespierre prit sur lui
d'attribuer au peuple français. Ce fut tout, et pour rencon-
trer en France la croyance à l'Etre suprême et à l'immortalité