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A TRAVERS LA KABYLIE 75 observer le Coran, à bâtir des mosquées dans tous leurs villages, à Tizi-Ouzou, notamment, à pratiquer leur culte en commun à l'exemple des Arabes, à célébrer leurs fêtes avec plus de pompe. L'Administration fut même invitée à rehausser par un éclat officiel les solennités musulmanes. On les a envoyés, aux frais du Trésor public, faire avec les Arabes le pèlerinage de la Mecque. On a écrit en caractères arabes la langue berbère qui n'avait pas d'écriture et à laquelle on aurait pu donner les caractères latins. On a agi de la sorte, non seulement en Kabylie, mais encore dans l'Aurès, où habite une population berbère. Par suite de ces mesures, les Kabyles sont devenus meil- leurs musulmans qu'ils ne l'étaient avant la conquête, et leur langue disparaît peu à peu devant la langue arabe. On a sacrifié la nationalité berbère au lieu de la soutenir et de la sauver. Les Kabyles, devenus plus fervents musulmans, se sont affiliés aux sociétés secrètes des Arabes, et se sont placés sous la direction des chefs à la fois religieux et poli- tiques de ces sociétés. En un mot, les indigènes étaient divisés : nous les avons réunis et réunis contre nous (p. 222). On commence à s'apercevoir qu'on a fait fausse route. On ne paie plus les pèlerinages à la Mecque ; mais on per- siste à leur imposer une civilisation dont ils ne veulent pas parce qu'elle est contraire à leur religion, et, en provoquant leur commune résistance sur ce point, on réunit encore contre nous les Kabyles et les Arabes. Il faut en arriver à reconnaître que la civilisation des indigènes vient de leur religion, et que tant qu'ils demeu- reront musulmans, ils repousseront toute civilisation euro- péenne. De ce que dans les pays civilisés le pouvoir religieux et