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ESSAI SUR LA CARICATURE II3 (.(fourberies » et son charme; et joie et tourment de l'éternel Adam! et avec quelle grâce sensuelle et quelle fine ironie! Je ne veux retenir de cet incomparable raient que le côté par où il égale le génie de Callot. Comme lui, s'il possède le sentiment et le goût des élégances cavalières de son temps, il a l'instinct et l'impression des guenilles pittoresques, des haillons radieux, la furie joyeuse des mas- carades avec la pose théâtrale et avinée de ses Chicards. Et cependant à travers ce pandémonium confus de masques et de braillards, c'est toujours un dessin précis, le sentiment correct de la forme, une couleur et une sûreté de procédé dont ce grand artiste a emporté le secret. Son contemporain, son rival, de vogue seulement, Daumier, fut le pessimiste de la caricature moderne, le laid l'attirait et quel laid! Jamais dans ses œuvres, de beau galbe ou de tournure élégante de femme. Ses bourgeois, ses flibustiers, ses dieux de l'Olympe, ses portières, sont maigres, ridés, flétris, vidés. Ils sont bien l'enveloppe des ridicules, des vanités, des peurs, de l'âme basse que flagelle sa verve — Méphistophélès et Aristophane avec le crayon inspiré quelquefois de Michel-Ange. Cham était aussi de cette école. Tout lui fut bon. C'est l'éphéméride des travers et des ridicules du jour, trop sou- vent avec les mêmes fantoches, mais si drôles, si bêtes, si humains! A citer tous les noms, cette revue n'en finirait pas, je retarderais trop, chers Elèves, l'heure de vos récompenses, mais pourrais-je oublier Grévin, ce fils direct de Gavarni ? Par un atavisme inexplicable, dans ses dessins exubérants de vie moderne, se retrouve et renaît, après deux mille ans, la tradition des Etrusques et des vases grecs ! La simplicité, la grâce, la sobriété du trait suffisent à ses scènes; plus de N° 2. — Août 1888. S