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290 IMPRESSIONS DE VOYAGE D'Arles, je ne pourrai rien vous dire que vous ne con- naissiez déjà tout aussi bien que moi. En visitant ces ruines imposantes, nobles vestiges que la civilisation romaine a laissés dans cette ville, je remarquai avec peine combien les restaurations faites à l'Amphithéâtre, nuisaient à l'effet pittoresque; et comme la teinte sombre et triste des vieilles assises du monument était plus belle et plus poétique* que ces blocs d'une blancheur aveuglante, qui rappellent une carrière en exploitation. Tout en cherchant ma route, à travers un dédale inextri- cable de petites rues étroites, pavées en cailloux pointus, je me mis à songer à l'éternelle vicissitude des choses humaines. Arles, grande et importante ville sous la domination romaine; capitale d'une province, puis d'un royaume, presque d'un empire, au Moyen Age ; se défendant contre sa décadence pendant la première moitié de ce siècle, grâce aux équipages de la batellerie, puis à la navigation à vapeur qui avait fait de ce point la tète de ligne d'une immense flotte de trente ou quarante grands paquebots; enfin, aujourd'hui que la Compagnie P.-L.-M. a supprimé les deux tiers des ateliers de construction et de réparation qu'elle y avait installés, Arles se dépeuple et ses finances ne lui permettent même pas de s'octroyer une Avenue, de la Gare, ou un Cours Gamhe.Ua, voie typique qui fait, de nos jours, l'orgueil de toute ville, grande ou petite, desservie par le chemin de fer. J'arrive à l'hôtel Pinus, à demi construit avec les colonnes, architraves ou chapiteaux du Forum romain, enclavés dans une façade moderne; bon gîte, qu'il faudra quitter demain pour monter à bord d'un petit steamer de soixante chevaux de force en destination de Saint-Louis- du-Rhône. Effectivement, le lendemain matin à six heures,