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288 LETTRES DU R. P. LA.CORDAIRE chrétienne. Les besoins de l'esprit public exigeaient qu'on l'exposât « dans ses rapports avec les.lumières de la raison, en montrant comment elle est irréprochable, sublime, dans les divers ordres de la pensée humaine ». Laissant de côté les opinions qui ne tiennent pas aux entrailles mêmes du christianisme, il fallait découvrir sa base dans l'histoire, dans la conscience, dans la société, et par là « résoudre le pro- blème du concours de la religion avec la raison, et de la société spirituelle avec la société matérielle », ces questions toujours traitées « dans un esprit conciliateur ». Tel était le soi-disant rationalisme du futur conféren- cier. Son libéralisme consistait, — sans prétendre faire intervenir la théologie pure, — dans l'acceptation con- vaincue, loyale, des institutions et des libertés que possé- dait et qu'aimait passionnément la France d'alors. Lacor- daire, considérant que, par un concours de faits et de lois supérieur à toutes les puissances politiques, la direc- tion des forces sociales n'appartient plus à l'Église, trouvait urgent d'affranchir celle-ci des entraves qui gênaient encore son action dans le monde. Or, cet affranchissement n'était évidemment possible et légitime qu'au nom de la liberté. Le vieux gallicanisme ne cessait pas d'être enseigné même à Saint-Sulpice, mais il n'avait plus de sens; et la doctrine ultramontaine était appelée à devenir le complé- ment de la doctrine libérale. Dans son zèle de rénovation, le jeune prêtre oubliait trop peut-être la situation intermé- diaire admirablement adaptée par le concordat aux conve- nances de l'état moderne ; il oubliait que le gallicanisme, ce n'est pas uniquement la lettre morte des articles de 1682, mais aussi un ensemble de traditions et d'usages en rapport avec l'histoire comme avec le génie de notre race dont,