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254 LES PEINTURES DECORATIVES S'il fallait cependant choisir la qualité qui captive chez ce maître et déterminer la vraie raison de son influence, c'est que ce qu'il fait a toujours été fortement et poétiquement pensé auparavant; il suit ainsi le précepte de Léonard disant que la peinture est chose mentale. C'est ici enfin qu'on doit éprouver le plus de sympathie pour Puvis de Chavannes, car il est de la famille des hauts esprits lyonnais par son goût pour les rêves grandioses, sa conscience à ne dire que ce qu'il éprouve, sa ténacité dans le travail, par sa probité (4). On a souvent eu l'occasion de remarquer la nature contrastée du lyonnais (5), homme du nord égaré dans le midi, cœur chaud et tête froide, qui allie le rêve au réel, le mysticisme à l'activité, le chiméri- que au positif, le désintéressement de l'idée et la charité à l'âpreté de l'intérêt. Comme tOHt est dans tout, nos artistes se sont trempés. dans ce double courant; les uns s'enivrent de l'idéal, les autres se confinent dans une observation savante, délicate, mais étroite de la nature. On ne s'attend pas à trouver en ces réflexions hâtives une histoire de la peinture lyon- naise; cependant on pourrait la faire courte. Avant notre siècle, point de grands artistes, hormis Philibert de l'Orme. Au début de la Renaissance Jean Perréal, dont on ne connaît rien mais auquel on prête beaucoup, et Cor- neille de Lyon dont on a quelques fins portraits qu'on peut (4) Natus Rhodani lac prohitaiis habet, disait déjà au VIe siècle, le poète Ennodius en visitant notre cité. (5) Celui qui écrit ces lignes l'a observé à son tour dans quelques études d'oeuvres et d'hommes qui nous sont chers : les Poésies de Bar- thélémy et de Jean Tisseur, les Vieilleries lyonnaises et les Oisivetés de Clair Tisseur, le Pèlerinage au Cayla d'Alexandre Tisseur.