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DE PUVIS DE CHAVANNES 247 vieux fleuves à barbe, pour le représenter sous les traits peu compliqués d'un robuste marinier de Givors ou lieux circonvoisins, s'apprête à jeter ses filets sur une molle et blonde Saône qui, légèrement renversée sur un arbre pourri, les pieds dans les fleurs, semble prête à toutes les soumissions. Malgré la rude puissance de son futur sei- gneur, on peut encore redire : Elle se fait aimer. Sa grâce est la plus forte Ainsi se présente, dans son ensemble, cette œuvre qui fait penser et qui émeut. La facture en est variée ; on peut ajouter qu'elle est inégale. Le Bois sacré, qui paraîtra à plu- sieurs, supérieur en poésie et en invention, donne la sensation juste, par son paysage brillant et obscur, par ses figures à l'état d'apparition, qu'il récèle le germe ignoré de l'art; c'était une tâche audacieuse que de rajeunir, sans l'aide de ces indications allégoriques si banales et si faciles, l'histoire usée des Muses. Dans la Vision antique, l'exécu- tion prend la force et la santé morale et physique des temps héroïques de la Grèce. Les terrains, dans leurs reliefs accentués, la couleur par ses oppositions plus décidées, semblent montrer que c'est l'architecture et la sculpture qui sont les modes d'expression antique. La peinture au contraire est l'art moderne par excellence, elle sort passion- née et informe du cloître chrétien. Aussi le faire de Y Inspi- ration chrétienne, est-il par intention, moins énergique et un peu effacé. Quant à l'exécution purement matérielle de l'œuvre, il faut concéder qu'elle est parfois irrégulière, à condition qu'on ait la volonté d'y prendre garde. Car le caractère invariable des grandes choses d'art, c'est de se