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i36             HISTOIRE DES DEUX ANTOINE

Chalier fut arrêté; après une procédure régulière, il fut
condamné par le jury ; la délibération avait duré vingt heu-
res. L'exécution eut lieu le 16 juillet et le 10 août suivant,
Kellermann, commençait le siège de Lyon.
   Après le siège, la guillotine de la place des Terreaux ne
fonctionnant pas assez vite pour la rage des bourreaux, le
pont Morand servit de passage aux nombreux convois des
victimes, qu'on allait fusiller en masse aux Brotleaux, à
l'endroit où nos pères leur ont élevé un monument.
   Lorsque Morand construisait et défendait son pont, il
était bien loin de se douter qu'il le mènerait à la gloire,
après l'avoir conduit à son dernier supplice.

   De nos jours encore, pendant l'insurrection socialiste
d'avril 1834, un boulet lancé par une batterie du pont Mo-
rand, est arrivé jusqu'au fond de l'appartement de César Jor-
dan (le frère de Camille), à l'angle du quai de Retz et de la
rue Basse-Ville, sans autre dommage que des glaces brisées.
Ce qu'il y a de curieux, et ce qu'on peut appeler la malice
des choses, ce boulet qu'on pouvait croire anonyme, lui
était adressé, bien involontairement, par son cousin de Gé-
rando, artilleur de cette batterie.
   Cette guerre d'avril fut singulière : les lyonnais en géné-
ral n'y étaient à peu près pour rien, les propriétaires encore
moins que les autres, et l'on faisait spécialement le siège
 de leurs maisons, avec des pétards et des coups de canon.
 (Voir Monfalcon).

   Quand des jours meilleurs revinrent pour la France,
l'utilité du pont Morand se fit de plus en plus sentir.
   Pendant toute la durée de l'Empire, l'esprit public, n'était
pas aux spéculations. Tout le monde à Lyon était à peu