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             EXPLOSION D'UN BATEAU A VAPEUR                  87

   Quoique plus d'un demi-siècle nous sépare de ce temps-
là, nous nous remémorons parfaitement la plupart des
détails de ce drame émouvant.
   Nous habitions sur la paroisse de Saint-Louis, à l'autre
extrémité de la ville; le bruit d'une explosion se fit entendre
jusque dans ce quartier éloigné. C'était un bateau à vapeur
du Rhône qui venait de sauter. Un quart d'heure après,
nous étions sur le lieu du sinistre. La première personne
que nous y reconnûmes fut un élève de l'école des Beaux-
Arts, le jeune Laplace, notre camarade, qui, tout affolé,
venait de voir son père écrasé par la projection d'un débris
de la chaudière du bateau. Il gisait étendu dans une mare
de sang, au coin du quai Monsieur et de la rue de la Barre,
dans laquelle il demeurait. Cette vue n'a pas peu contribué
à frapper notre esprit et à y graver le souvenir de cet
événement.

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   C'était le dernier jour du carnaval, le 4 mars 1827. Lyon
était en fête ! tout respirait le plaisir !... Les premières ef-
fluves du printemps faisaient sentir leur heureuse influence :
tout promettait donc une belle journée ! On se disposait à
fêter joyeusement le dimanche des Brandons, appelé à Lyon
le dimanche des Bugnes.
   Dans chaque quartier retentissait une musique bruyante;
des groupes de gens masqués, couverts de costumes bizarres
de toutes époques et de tous pays ; la bande des Souffleurs,
celle des Gagne-Petit, et la plus populaire de toutes, celle
de Bourgneuf; plusieurs bandes particulières et des mas-
ques isolés débouchaient de toutes les rues et venaient se
masser sur la place de Bellecour.
   Ces masques, cette foule de gens de toute condition, Ã