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DEUX MOIS EN ESPAGNE 187 de la ville offre peu d'intérêt et rappelle les cités de com- merce et de fabrique. Il existe cependant un fort impossible à passer sous silence : c'est celui de Montjuic, appelé sans cesse à prendre part aux événements politiques de la Catalogne; il s'élève au bord de la mer sur une montagne, et offre au promeneur un panorama admirable; mais comme il l'a maintes fois prouvé, ce n'est point pour l'agrément seul de Barcelonne qu'il y a été dressé, et le dernier usage qu'en fit le général Espartero, en 1840, a laissé de si cuisants souvenirs à ses citadins, qu'il faudra bien des années avant que tout bon Catalan en perde la mémoire. Au reste, plus que toute autre ville, Barcelonne est accoutumée aux terribles revers de la guerre; placée dans le voisinage du lieu où les Pyré- nées s'affaissent dans la mer, elle a constamment soutenu les plus rudes attaques de la France. Subjuguée, au com- mencement du règne de Charlemagne, qui s'en servit de boulevard contre les infidèles, elle fut le point de départ des nombreuses croisades de la chrétienté, guerres dont nous n'avons, comme souvenirs, que quelques débris de chants populaires. Ces expéditions, alternativement victo- rieuses et vaincues, finirent par être obligées d'abandonner la Catalogne, qui, sous le nom de Marches-d'Espagne, per- sévéra bravement dans cette lutte, mais qui n'en put sortir qu'en s'unissant au royaume d'Arragon. Plus tard, les guerres de la succession renouvelèrent ses angoisses. On sait avec quelle admiration Philippe IV parlait de sa résis- tance; elle ne fut pas moins énergique au temps de Napo- léon, et ne fut pas une des moindres causes de la chute de cet empereur. Toute cette histoire a laissé à ce pays une empreinte à demi française, en dépit de la haine qu'il nous porte. Dans un commerce de tous les jours avec notre port de Marseille,