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ou L'ÉCOLE DES PAYSANS 451 sera mon enfant comme le tien, admirable petite mère. Nous lui prodiguerons ensemble nos soins et notre atta- chement. « Le père André, revenant de son travail, m'aperçut et se hâta de venir nous rejoindre. Il me serra cordialement dans ses bras. Sa figure vénérable, vieillie par ses derniers chagrins, m'inspirait plus que jamais du respect et de l'af- fection. En secouant chaudement ses mains, je lisais dans ses yeux, à la fois tristes et bons, qu'il avait souffert par moi et qu'il me pardonnait; je voyais qu'il ne voulait plus pen- ser qu'au plaisir de mon retour. « Je ne vous raconterai pas, mon bon maître, les heu- res charmantes qui se sont écoulées auprès de mes trois chers hôtes. « Un lit me fut préparé dans ce même grenier qui a été honoré de votre présence et qui est maintenant pour nous comme une chambre sacrée. J'y ai passé la plus délicieuse nuit. « Le lendemain fut encore une journée de bonheur. « Tantôt je me promenais avec Jeannette dans son jar- din, ou bien je soignais avec elle ses légumes et ses ani- maux. « Tantôt j'aidais le père André dans ses travaux, pen- dant que les deux ménagères s'occupaient de l'intérieur de la maison, et c'est dans un de ces moments que je fis à mon vieil ami la confidence des soupçons odieux qu'avait soufflés dans mon âme la plus méchante des créatures; pas plus que moi, l'excellent père ne pourra découvrir à sa fille des suppositions aussi injurieuses, et à peine osera-t-il les dévoiler à sa femme. « Le jour suivant, il fallut songer au retour. Les adieux furent pénibles ; mais l'espérance de se revoir, de s'écrire de longues et affectueuses lettres, diminuait l'amertume de