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ALBERT ALBRIER 441 que le bonheur de M. Albrier était de venir en aide à son prochain, non pas seulement par des secours d'argent, mais par de bonnes et fortifiantes exhortations et par de salu- taires exemples. Membre de la Société de Saint-Vincent de Paul dès l'âge de dix-sept ans, notre jeune ami déploya le zèle le plus ardent dans les visites qu'il était chargé de faire, et le plus souvent, après avoir épuisé les faibles ressources de l'association on le vit consacrer à ses aumônes le fruit de ses petites économies, et distribuer encore les provisions qu'il obtenait d'une mère heureuse d'encourager les nobles instincts de son fils. Albrier écrivait un jour à M. l'avocat- générai Nadault de Buffon ces belles paroles qui le peignent admirablement : « On se sent meilleur en quittant le foyer « de l'indigent, et je suis d'accord avec vous lorsque vous « écrivez : avec la charité, la fortune devient une lettre de « change que le pauvre tire sur le riche. » Combien de familles pourraient attester que cela fut surtout vrai pour M. Albrier! Il suffit en général d'avoir le cœur sensible pour se lais- ser toucher par la misère et ouvrir sa main à celui qui men- die, mais il faut avoir l'âme chrétienne pour savoir pardon- ner les injures et se consoler de l'ingratitude des hommes. Albrier posséda au plus haut degré ce sentiment élevé. Un fait, que l'indiscrétion d'un témoin nous permet de rapporter, va le prouver. Un jour, en pleine rue, une femme grossière et sans cœur, vomit des torrents d'in- jures, à coup sûr bien imméritées, contre l'excellent jeune homme. Des personnes qui avaient assisté à cette triste scène vinrent en rendre compte à M. Albrier en ter- mes indignés; et lui de les calmer de son mieux et de leur dire qu'il ne fallait point en vouloir à cette malheureuse que la colère aveuglait, que le mieux était de tout oublier. On insista néanmoins sur la gravité du fait, répétant que la