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ou L'ÉCOLE DES PAYSANS 369 rien!... Ah ! tout s'explique maintenant. O malheur! O honte! O trahison ! Toutes mes affections brisées! Mon coeur est déchiré, anéanti ! Ce qui était ma vie est détruit à jamais!.... Allons! je m'ensevelirai dans un régiment, et j'y deviendrai une machine sans âme et sans vertu. Fuyons pour toujours ces abominables lieux ! Partons ! » Et, le désespoir dans le cœur, il sortit du hameau d'un pas précipité. XII. Quel fut notre étonnement de ne plus voir notre hôte ! Nous cherchons, nous nous informons, et nous apprenons avec la plus grande surprise qu'il a pris la route de Lyon. Pourquoi? Nous nous perdons en conjectures, en inquié- tudes. Deux, trois jours se passent sans aucun éclaircissement. Je me décide à écrire à Pierre, que je suppose rentré dans sa caserne, où quelque ordre subit a pu le rappeler. Pas de réponse. Une lettre peut se perdre, j'en adresse une seconde. Même silence. Je craignais un grand malheur. Je me décide à faire le voyage de Lyon. Dans la caserne, où je demande le fourrier Pierre Joly, on me répond qu'il est sorti momentanément pour son service et qu'il est allé jusqu'à Sathonay, d'où il sera de re- tour dans une heure. Je respirai. Je résolus d'aller à sa rencontre, dans l'inten- tion de l'entretenir librement dehors, à cause des reproches que j'avais évidemment à lui faire. Je gravis rapidement le faubourg de la Croix-Rousse, ha- bité par les ouvriers en soie, je m'avançai sur le chemin où Pierre devait passer. Je le vis, en effet, paraître à quelque 24