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UNE FEMME MUISÉE 399 cloître et n'avait plus qu'un souffle de vie, il laissa à Dieu et au temps le soin de faire justice. Guillaume de Mornieux arriva à Gramont peut après les scènes lugubres que nous venons de d'écrire ; c'était un homme juste, équitable et pieux. Il avait trois ans de moins que son frère; veuf sans enfant il n'eut jamais la pensée de se remarier. Souvent il avait donné à son frère de bons conseils trop mal accueillis. Comme lui.il avait fait les guerres de Picardie et s'était retiré dans une petite terre près des moines d'Ambronay, sa seule société. Aimant, appréciant Gabrielle, elle était la personne qu'il aimait le mieux sur la terre. Au moment de l'arrivée de Guillaume de Mor- nieux, Siffroy allait mieux, mais Roger toujours atteint d'une fièvre violente, donnait de sérieuses inquiétudes au père Athanase. Gabrielle se précipita dans les bras de son oncle; ses larmes, sa douleur, le touchèrent profon- dément. Il l'embrassa avec tendresse et promit de mettre tout en œuvre pour la consoler, l'adopter enfin comme sa fille bien-aimée. Guillaume apprit en frissonnant tous les détails des terribles événements qui avaient apporté la désolation au manoir, il causa longuement avec le sénéchal et le père Athanase, vit le jeune Roger, et le pria de se considérer comme chez lui au manoir. Le premier soin du tuteur de Gabrielle, fut de faire célébrer un service solennel pour la comtesse de Mornieux; tous les vassaux, tous les seigneurs du voisinage y furent conviés. La jeune châtelaine trouva dans l'affection de son oncle le plus grand adoucissement à ses maux. Elle parut avec lui en grand deuil, à la cérémonie funèbre. Tous les deux passaient leurs soirées dans la chambre de Roger, et leur amitié, leurs consolations pénétraient comme une bienfaisante rosée dans le cœur de l'infortuné jeune homme.