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DE ROANNE A LA PRUGNE 199 — Une plante druidique comme la verveine. —• Un fenouil de pharmacien ! la meilleure de toutes les herbes de la Saint-Jean ! Le grand saint Jean gaulois règne au pays. Au bout du bourg, sur la grande route, une eau vive jaillit d'un vulgaire tuyau de plomb et d'un mur à pierres sèches, dans une auge taillée en sarcophage. Cette fontaine sour- dait, avant la route, en contre-bas de l'église, à droite. Elle attirait, au solstice d'été, un immense concours de fidèles, rustiques pèlerins de la plaine et de la montagne. 'Ce jour-là , Ségusiaves fiévreux, la tête enveloppée et douloureuse des accès paludéens ; Arvernes, les yeux rougis par l'air trop vif de leurs vallées humides, arri- vaient au bord de l'antique source sacrée; le dieu des temps païens avait ensuite disparu, mais son onde salu- taire coulait toujours pour les naïves populations. Saint Jean guérissait les croyants, en place de la divinité cel- tique, et voilà pourquoi nous le nommons le grand Saint Jean Gaulois. Nous avons pour le précurseur un culte, nous saluons en lui le grand initiateur, le saint des lu- mières et du feu ; celui qui baptise dans l'eau et dans' l'esprit, chasse les chimères, l'ignorance de la pauvre cervelle humaine, dessille les yeux malades de toutes nos obscurités et prépare Y avènement. A cette fontaine aboutissaient de vieux chemins creux, noirs, étroits, bordés de roches énormes, pavés de cailloux roulants, des voies gauloises; une statuette du saint gardait la source et les avenues pleines de foules, besogne difficile. Au temps où les mœurs des aïeux s'en al- laient brin à brin, comme lés feuilles de trembles, on faisait de bonne foi, bien contrit, bien recueilli, ses dé- votions en l'église de la Prugne, on buvait d'abondance à la source et jamais son eau légère ne bétançait (retar- dait) le pèlerin.