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DE ROANNE A LA PRUGNE 59 gentianes bleues; leurs vaches paissaient; Romaine, la jument, broutait le feuillage des arbres, tout le monde avait faim. Verse ! Verse ! Verse de la gourde génoise gar- nie de jong tressé ; tire le bissac. Les ramées se couchent sur l'eau, le coudre penche, le verne s'incline au long du'ruisselet, mais le houx dresse ses piquants, le bouleau grêle blanchit sous bois, le tremble trémousse des feuilles, dans l'ombre indécise Aient le chêvre-feuille et la clématite, les bergères chan- tent. 0 vieux père Corot fumant ta pipette, reviens ! Quand la fauvette chante, c'est à demi cachée, discrète attentive, lui faut la pénombre, le silence, la sécurité du bocage ; mais la bergère du Bessay nous savait der- rière l'alisier nainj; elle se sent écoutée et d'une Voix splendide de contralto, résonnante, vibrante, elle accen tue un refrain rustique... la forêt fait écho, le bois tressaille ; mêlée au soupir du vent, au bruissement des ramilles, au jeu de l'eau sonore, la voix jette une note ou deux! se t a i t . . . puis recommence pleine et timbrée. Le troupeau capricieux entraîne la bergère au beau mi- lieu du p r é . . . le fuseau rompt étourdiment le fil: co- quetterie ! on ne chante plus Avisant lors la fille : elle portait des pendants faux longs d'une demie aune qui tintaient comme sonnerie ! elle avait mis des boucles d'oreille à sa muse ! Tout est donc défloré, vieilli, fini! Quel chasseur moderne a passé là ? Quel voiturier de faubourg sur la route nouvelle a roulé? Quittons ces lieux désenchantés. Autre horizon ; vers le midi, les plaines de Feurs.par delà les plateaux de Neulise ; plus loin la plaine de Mont- brison hérissée de monticules ou cônes dont chacun porte sur son basalte église ou château. Saint-Romain, Mont-Isoure, et au plus près Mont-Verdun. Là , sur la,