page suivante »
CHRONIQUE LOCALE —• Quelle sécheresse affreuse ! quelle calamité pour les campagnes! Les blés torréfiés, les vignes desséchées, le bétail mourant de soif, la terre ouverte et crevassée refu- sant la semence de l'an qui vient ! c'est à se désespérer ! Et sans eau, plus de navigation, plus de transports écono- miques, plus de forces motrices pour les machines ; l'indus- trie est aussi malade que l'agriculture! — Pardon, cher Directeur ; vous vous plaignez de la sé- cheresse ; voilà six mois qu'il ne se passe pas un jour sans pleuvoir. — Je ne me plains pas, hélas! de la sécheresse actuelle, cher lecteur, mais de la sécheresse à venir. La nature est organisée avec une sagesse inouïe. Tout est réglé et pondéré avec une prudence qui n'échappe à aucun regard. Un Grand-Livre est ouvert où tout est passé par Doit et Avoir ; tout s'y règle et tout s'y paie. Si vous dé- pensez,vous ne possédez plus.Vous avez cent litres d'eau qui doivent vous durer six mois. Si vous les videz en quinze jours, vous serez à sec pendant cinq mois et demi ; c'est une loi inexorable que connaissent bien les ivrognes, les fils de famille et tous les dissipateurs. En ce moment, les cataractes du ciel nous versent, en une saison, la pluie qui devait nous faire l'année ; croyez que bientôt il nous en cuira. Veuillez en prendre note et vous verrez. ** En attendant, nous avons de l'eau à ne savoir qu'en faire. La terre ressemble à une éponge ; les foins coupés pourris- sent et les blés ne sont pas oeaux.