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                  HISTOiRE D'(J.\E PENDULE               449

   Par le fait, je gagnais assez ; assez pour bien faire ins-
truire mon garçon, assez pour tendre de temps en temps
la main à moins aisé que moi. Mais il n'y avait rien de
trop, je vous assure, car ce qu'on ignorait au pays c'est
que j'avais deux tantes âgées en Bourgogne, soeurs de
feu mon père, auxquelles j'envoyais deux fois par an
presque tout l'argent nécessaire pour subsister petitement.
Ainsi que toute notre famille, elles étaient nées dans l'ai-
sance, mais, depuis de longues années, vivaient* dans la
gêne. Mon père me les avait léguées à son lit de mort.
   Un jour, il m'arriva un petit cousin du pays où demeu-
raient mes tantes. Il m'apportait leur boDJour et six paires
de bas de laine fins et blancs qu'elles m'avaient tricotés
par ^manière de reconnaissance. Comme il se trouvait là
un dimanche à l'issue de la grand'messe, il entendit les
plaisanteries habituelles sur le désagrément d'être surpris
par l'heure, quand seulement on commençait à parler
tant soit peu sur le compte du voisin. Ceux qui me les
faisaient les trouvaient d'autant plus piquantes que mon
père avait été horloger de son état.
    Comment, à son décès, n'avoir pas gardé une seule de
ses horloges? Pour faire comprendre cela, il m'aurait fallu
raconter sur ma défunte sœur, sur mon beau-frère, de
tristes histoires que j'aimais mieux ne pas dire, mais que
lui, le petit cousin, n'ignorait pas.
    — Cousine, me dit-il, quand la boutique se fut vidée
 et que nous nous trouvâmes en face d'une vaste soupière
 d'excellente soupe au lard, flanquée d'un plat de chou-
 croute aux saucisses et d'une boîte de sardines, car je
tenais à le fêter , il est fort incommode pour vous de ne
pas savoir l'heure ; vos tantes ont, elles, une horloge con-
fectionnée par votre père, une "pendule moderne dont
 M. Tamain, le notaire, leur fit présent lorsqu'elles ima*