page suivante »
360 TOUSSAINT DECHAZEt Il fallait faire ses études à Paris sous les maîtres habiles qui dirigeaient les Gobelins. Un élève de Baptiste vint se fixer à Lyon. Ce fut sous sa direction que Tous- saint Dechazelle étudia la fleur et l'ornement. Fier de son élève, le professeur se chargea lui-même de le placer dans une des maisons les plus importantes de Lyon. Mais ses débuts furent rudes. D'une part, les " patrons, vieillis dans les affaires, commençaient à avoir le goût un peu suranné. D'autre part, le jeune débutant, habile à imiter la nature, était inexpérimenté encore dans l'art du tissage; ses inspirations artistiques, gênées dans leur essor, se dégageaient avec peine des entra- ves et des exigences de la fabrique. Petit à petit, le découragement s'emparait de lui, d'autant plus que les bonnes grâces de son patron allaient s'affaiblissant d'une façon trop manifeste. Ce découragement arriva à un point tel que: «je me trainais par terre, dit-il, dans « un moment de confidence, je m'arrachais les cheveux. « Tu n'as point de talent, me disais—je à moi-même, tu « ne réusiras jamais qu'à recueillir la honte. » Enfin, désespéré, un beau jour, il prend la résolution de cher- cher dans un monastère l'oubli de ses déceptions. Comme il montait à Saint-Just, d'un air égaré, pour accomplir son projet le hasard, ou mieux la Providence, voulut qu'il se rencontrât face à face avec son profes- seur de dessin. — Où donc allez-vous avec tant de précipitation? lui dit celui-ci. — Je vais, répond le jeune homme les larmes aux yeux, trouver le supérieur dés Génovéfains et embrasser la vie religieuse, car j'ai compris que je ne suis bon à rien autre dans ce monde. Et il lui raconte en détail ses insuccès et la défaveur que lui a value, de la part de ses chefs, son incapacité.