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122                 LA BATAILLE DE NÉZIB

    — On ne se rétire pas la veille d'une bataille, reprit,
 avec beaucoup de sens, le séraskier.
    Consterné, l'Etat major prussien resta et consentit à
 suivre les péripéties de la lutte mortelle qui allait s'en-
 gager.
    A la tête de deux régiments de cavalerie, de quatre
batteries à cheval et de ses fidèles Hanadès, Ibrahim,
précédant l'armée, se dirigea rapidement vers le pont
d'Horgoun, jeté sur le Karsim après sa jonction avec le
Mezzar. 11 le croyait détruit et s'apprêtait à le rétablir
pour le passage de l'armée. On peut juger de sa joie en
voyant que les Turcs avaient négligé de le couper. En
l'apercevant intact, il lance ses cavaliers, s'en empare et
ne s'arrête que quand il l'a franchi et mis à l'abri der-
 rière lui.
   Quelques escadrons turcs, en voyant les Egyptiens
marcher si rapidement sur le pont, voulurent alors le leur
disputer et ils se lancèrent au galop de ce côté, mais la
distance était trop grande pour qu'ils pussent arriver à
temps. Les Egyptiens avaient franchi le passage quand
ils s'approchèrent. En les voyant si près, Ibrahim sentit
bouillonner son courage et il ne put se retenir de les
braver :
   — Plantez vos lances en terre, dit-il à ses cavaliers, et
quand ils verront vos flammes, ils resteront en repos.
Qu'on me donne un tapis.
   Et se couchant à terre, en présence des Turcs éton-
nés, il s'arrangea pour dormir. L'ennemi intimidé de
cette témérité et de la contenance de l'avant garde se
retira pas à pas sans oser troubler un si héroïque sommeil.
   Pendant cette marche périlleuse autour d'un camp si
fortement assis et occupé par une armée nombreuse et ré-
solue, Soliman, lebonnet rouge plus rejeté en arrière qu'Ã