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280                 MAURES ET SARRASINS

frappés à la vue des objets les plus accentués des pays où
les migrations les amenaient et où ils fixaient leurs tentes,
ont agi ainsi sous l'influence de ces circonstances natu-
relles. Pareille raison n'existe-t-elle pas chez les tribus
les plus sauvages que les voyageurs découvrent journelle-
ment ? Et nos colons modernes ne font-ils pas de même ?
   A ce nom si caractéristique de Maurienne, nous join-
drons les suivants, que nous pourrions au besoin multi-
plier ; de même origine, de même étymolog'ie, ils servi-
ront, ce nous semble, à appuyer notre proposition.
   Le crêtdu Maure, le mont Morion et le pic du Mare (le
grand par excellence) ; Morgine, Morcine et Morzine
(grand plateau) ; Mortine (grande montagne) ; les côtes
des Mortènes (les bois des grandes montagnes) ; le Morvan
(le grand montagneux) ; Morgon (grand sommet) ; Je Mor-
taret et la Mortare (le grand mont et la grande montagne) ;
le mont Margeriaz (le mont aux grands rochers) ; Merpuy
 (grand puy) ; Morancé, Moirieux et Moiré (Mauriacus,
Moriacus) où l'on retrouve aussi l'idée de grand, de posi-
tion élevée.
   Nous ne parlerons ici que pour mémoire des nombreux
 Moras et Morat, Morêtel et Morestel, où des écrivains
 dauphinois veulent voir un souvenir d'anciennes stations
 de Maures (Mauriscum slatio), tandis que, en réalité, ces
 divers lieux ne doivent leur nom qu'à leur situation au
 sein d'un pays marécageux. Mais nous apporterons pour
 preuve irréfragable la ville de Mont-Maur, dans la Drôme
 (mons major, castrum de monte majori, devenant plus
 tard castrum de monte Mauri).
    Il est certain que le clerc du moyen-âge qui latinisa
 maur en major connaissait le sens de ce vieux mot, puis-
 qu'il lui donna, en le traduisant, un synonyme parfait
 correspondant au français Mont-Grand ou Grand-Mont.