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288 JEAN-PIERRE BRUYÈRE. seulement au loin des célébrités de la bibliographie qui avaient su le découvrir au fond de sa province, malgré le silence des journaux et de la réclame qui n'ont du bruit, on le sait, que pour ce qui se démène et s'agite dans le tourbillon parisien. C'est de cet homme digne, honnête, modeste, que nous allons esquisser la vie ; nous aurons peu à dire, son exis- tence entière s'étant passée à Lyon, entre les soins de sa famille et les travaux de son atelier. Bruyère naquit, le 20 ventôse an xn, place Confort, 65, dans un des pavillons de ces bâtiments qui furent plus tard la Préfecture. Sa famille étaitoriginaire de l'Ardèche ; son grand-père était venu s'établir à Lyon et y avait vécu de travail et d'économie. Son père, Jérôme Bruyère, apprit l'état de relieur et, s'étant marié, monta, en 1802, un modeste atelier que, par son zèle et ses soins, il fit prospérer; ce fut là que deux ans après, Jean-Pierre i naquit. Le commerce reprenait ; sous la puissante main qui gouvernait la France, toutes les carrières se rou- vraient, toutes les industries prenaient un nouvel essor. Le mouvement littéraire n'était ni moins vif ni moins actif que le mouvement commercial. Lyon, qui faisait dispa- raître ses ruines, relevait ses monuments et, en même temps, reconstituait ses bibliothèques bien délaissées, et se reprenait à lire, exercice bien oublié. Les vieilles famil- les revenues ne se contentaient pas des petits journaux qui paraissaient deux fois par semaine; il leur fallait de bons ouvrages qui pussent consoler et fortifier l'esprit. L'ate- lier de la rue Confort se trouva bientôt trop à l'étroit et, pour suffire aux demandes, Jérôme Bruyère s'établit presque en face, à l'angle de la place, précisément à l'en- droit où la rue Childebert est ouverte aujourd'hui. Les vieillards seuls, les vieux Lyonnais se rappellent cette antique place des Jacobins, cette place de Notre- Dame de Confort, de forme triangulaire, dont un angle était à I'ouverfure de la rue Saint-Dominique, un autre Ã