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230 VIVE LA FRANCE! Ces mégères de triste augure prirent un certain air de compassion devant Jeanne, en la regardant jusqu'au blanc des yeux, et en murmurant, sur je ne sais quel ton de psalmodie lugubre : — Ah! bon Dieu!... pauvre, pauvre Jeanne I... — Qu'y a-t-il donc? s'écria l'infortunée, en tremblant. — Oh! rien... — Mais alors, pourquoi me parlez-vous ainsi?... Et les villageoises de rentrer prestement chez elles, avec des figures mystérieuses. Il en fut de même presque partout, lorsque la femme du maire, qui était une excellente personne, au-dessus de ses voisines, par la bonté, l'intelligence et une certaine éduca- tion, eut pitié de Jeanne, la prit par la main, l'emmena dans sa demeure, et là , s'asseyant auprès d'elle, elle l'em- brassa affectueusement en pleurant... — Ah! mon fils est blessé !... s'écria la pauvre mère... Son amie ne répondit que par un douloureux silence. Le maire et le médecin venaient d'entrer avec le curé du village. — C'est au ciel qu'il faut chercher votre enfant, ma bonne Jeanne, dit le pasteur avec beaucoup d'égards, Julien s'est montré bien courageux à Montre tout ; il a donné son sang et sa vie à la France!... Je renonce à décrire ce désespoir maternel qu'aucun désespoir n'égale; un seul mot, un seul nom se faisait entendre au milieu des plus déchirants sanglots - — Mon fils!... Julien!... Julien!... Tous ceux qui étaient là plenraient du fond de leur âme, car chacun avait aimé ce bon et noble jeune homme, l'en- fant d'élite du village et des alentours, le plus beau, le meil- leur, le plus intelligent, le préféré et l'orgueil de l'endroit. La femme du maire voulut prendre chez elle la mère Jeanne, pour lui donner de tendres soins, pendant que son mari, le curé et le docteur iraient annoncer la terrible nouvelle au père François.