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               UNE ARRESTATION EN DAOPHINÉ.                473

du roi et qu'il prendrait un parti à ce sujet dès qu'il en
 aurait, comme de juste, suffisamment conféré avec Mme la
duchesse.
    À bout de quelques jours , M. de Saint-André voyant
que ses hôtes continuaient à se divertir plus que jamais
et ne paraissaient nullement s'occuper de choisir entre les
deux prisons proposées, prit un parti décisif, quelque re-
gret qu'il eût d'être obligé de l'employer : il alla les trou-
ver avec M. Le Clair, et après avoir fait faire par celui-ci
une peinture hideuse de l'arsenal de Grenoble, il se ha-
sarda à leur demander s'ils ne préféraient pas de beaucoup
la Charité-sur-Loire, leur dit qu'il venait d'en écrire au
gouverneur, qui serait tout à leurs ordres et qui préparait
déjà sans doute une réception digne de si aimables hôtes
et de grands seigneurs espagnols d'une naissance si an-
cienne et si éminemment distinguée.
   Quand M. l'aide-major eut fini de parler, M. le duc se
retourna du côté de madame, qui répondant en femme
soumise à l'appel que son mari faisait à son éloquence,
prit la parole avec un vif empressement, et, pendant plus
de trois quarts d'heure, ce que l'avocat le plus consommé
aurait peut-être eu peine à faire, discourut avec la plus
extrême facilité sur l'inconvenance et l'injustice de l'arres-
tation dont ils étaient les victimes ; quand elle vit qu'elle
avait bien fatigué ses auditeurs, qui n'avaient guère envie
de répondre à ses objections, car elle avait terminé par de
si folles et de si enfantines qu'on n'aurait guère su par quel
bout les rétorquer, elle s'arrêta court, dit en femme qui a
bien pris son parti, que tout ce qu'on lui disait était bel et
bon, mais que, quoi qu'il pût arriver, elle ne pouvait ni ne
voulait nullement quitter Grenoble.
  Ce fut alors au tour de M. le président à s'expliquer. J'ai
déjà eu, je crois, l'occasion de dire qu'il était naturellement
d'une éloquence qu'il est bien rare de rencontrer, mais ce
que j'ai certainement omis d'enseigner , c'est que par une
bien louable persévérance il avait cultivé, par d'énormes