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168 CHRONIQUE LOCALE. en huit jours, on tue à une dislance de trois lieues. On remplace l'homme par le fer, l'intelligence par la précision , le poète par le mathématicien, l'écrivain par le journaliste, l'organisateur par le démolisseur; eh bien, vrai! demandez-le à la conscience : sommes-nous plus grands, plus heu- reux, meilleurs ? C'est le progrès ; est-ce le mieux ? Examinons et attendons. — Une femme qui, comme les trouvères antiques, va de ville en ville en récitant les vers des grands écrivains, une femme au talent souple au point d'interpréter à la fois Corneille et Lamartine, M me Ernst a donné à Lyon deux ou trois séances; elle a eu à peine quelques personnes autour d'elle. Un avocat gascon, de ceux qui démolissent les palais pour se faire un marchepied, a paru dans notre ville ; il a parlé ; quel enthousiasme et quelle foule ! Un voyageur apporte cinq ou six chefs-d'Å“uvre de nos pais grands pein- tres ; il annonce le Titien, Salvator Rosa, Michel-Ange, Rembrandt; qui est allé le voir? Les kiosques et les vitrines des libraires étalent les plus ignobles dessins, les plus immorales représentations , les caricatures les plus basses et les plus viles; la foule accourt, admire et applaudit. Cela, elle le comprend. Le Titien ot Corneille, on ne les comprend plus. — Autre chose encore a fait courir la fou'e. Le 31 juillet à 4 heures du matin, a eu lieu l'exécution d'un assassin, BarthélcniyBernard, d'Ampuis. Depuis huit jours, des personnes attendaient la terrible expiation ou plutôt l'intéressant spectacle et passaient la nuit sur la place. Aussi, dès le malin, les journaux qui cherchent la vente donnaient- ils la relation des derniers moments du malheureux et reproduisaient ses dernières paroles. Tous les tirages ont augmenté. — On ne joue plus la tragédie, mais les clodoches font fureur ; en ce moment, on ne représente à Lyon que la Chatte blanche au Grand-Théâtre et les Brigands aux Nouveautés, non pas ceux de Schiller, grand Dieu ! ne confondons pas; non, non , ceux d'Offcubach. — La ville a été assaillie le dimanche 28 juillet, à la tombée de la nuit, par un orage comme on n'en voit que sous les iropiques. La foudre a frappe plusieurs monuments et plusieurs personnes. Des voilures, des pa- villons, des établissements ont été renversés, des arbres arrachés. Le palais de l'Exposition, qui paraissait si frêle, tremblait, mais a vigoureusement résisté ; les dégâts y ont été relativement insignifiants. La foule qui assis- lait aux fêtes du Parc a été surprise en plein air et a éprouvé un instant d'indicible terreur. Les femmes criaient, les enfants pleuraient ; des bar- ques, sur le lac. ont chaviré. Heureusement que personne n'a péri. —SIM. de Prandière, avocat général à Lyon et Berlhand, président du tribunal de Roanne, ont été nommés conseillers à noire Cour d'appel. M. T e n e t , président du tribunal de Trévoux, est nommé président à Villefranche. — On annonce que le savant et regretté M. de la Saussaye, recteur de l'Académie de Lyon, songerait à prendre sa retraite. Ce sera une perte profonde pour les études historiques et archéologiques de notre contrée. M. de la Saussaye serait, parait-il, remplacé par M. Francisque Bouillicr, notre compatriote, inspecteur général de l'Université. — La mort a frappé, dans le courant de juillet, M. Carlhant, écrivain, ancien maître des requêtes au Conseil d'Etat, et M. Nérée-Désarbres, vau- devilliste ; puis, au commencement d'août, M. Chaverot, plâtrier, membre du comité de salut publie , conseiller municipal, ami des Ferrouiilat et des Baudy. L'enterrement civil, contre lequel sa famille a protesté, avait attiré une foule considérable. Son nom sera attaché à notre histoire, article finance et administration. — Nous venons de lire avec le plus vif intérêt un nouveau Guide histori- que, descriptif, religieux et industriel de l'Etranger à Lyon, orné de plu- sieurs gravures et d'un plan de la ville , grand in-18 raisin , que publie M. Jossejrand, éditeur, C'est un ouvrage complet, clair, concis et bien écrit. A. V. Lyon, imp. d'ÂiMÉ VÃNGÃŽRINIER,directeur-gérant.