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APPROCHE, SI TU ES HARDI ! 77 il fut bien convaincu qu'il était seul dans le pré, il se mit à sa place accoutumée pour guetter lafayolle ; et ses pre- mières attentes, ses désirs, ses espérances, jusqu'à ses inquiétudes, se renouvelèrent aussitôt. Il avisait sous les arbres, il avait l'œil fixé sur le tronc. Oh ! si le craque- ment allait se l'aire entendre ! si le chant du rossignol ïépondait à la voix de la fée ! Dix heures, onze heures sonnent, l'air embaume, le vent soupire ; sous le poirier, une blanche fille apparaît. Le gars s'élance pour saisir sa conquête de la foire. VII Là . LANGAGNE. (1) Violent et fort était le remède contre les imaginations de Clément ; les camarades ne l'adoucirent point de leurs grands éclats de rire. Dans sa colère, il déchirait les habits blancs si mal portés. C'est alors que la donzelle eût désiré se rendre invisible, comme une véritable fée, mais était- elle sorcière elle-même ? avait-elle machiné quelque breu- vage? Cette colère cessa tout d'un coup, comme grand vent par petite ondée, et les voilà partis, bras dessus, bras dessous, sans vergogne ; Clément se coiffa de cette créa- ture. Quand on lui parlait de religion, de bonne conduite et renommée, il pliait les épaules et branlait la tête : Ne me comptez plus ces histoires merveilleuses, bien sot est celui qui conserve ses croyances ; vive ce qu'on tient etmanie réellement, ce dont on jouit véritablement, le reste n'est que fumée. Que me font toutes vos radoteries et tou- tes vos inventions de sagesse, de fileuses de chanvre, dont la quenouille se garnit de soie et d'or, de bergères qui épousent des rois, des valets qui deviennent les maris des princesses? J'aime mieux ma mie Catherinette; avec elle, (1) Maladie de langueur.