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CLOTILDE DE STJRVILLE ET M. ANTONIN MACÉ Un jour, une troupe de bergers trouva les débris d'une statue de marbre de la plus splendide beauté. Chaque enfant rapporta son morceau : un bras, une jambe, le torse, la tête. On put, le soir, reconstruire un Apollon, comme l'esprit humain n'en avait jamais rêvé. Sur le socle, était écrit ce mot : Phidias. Un savant , attiré par la découverte, se mit à rire et déclara qu'il n'était pas dupe de la supercherie et, avec une conviction qui n'admettait pas de réplique, il déclara que chacun des bergers avait sculpté dans les champs un morceau du marbre, l'avait rajusté à celui de son voisin et avait contribué ainsi à faire une statue, magnifique il est vrai, mais moderne. On' lui fit observer que les cassures du marbre indi- quaient jadis un bloc unique, une statue une et entière. Qu'une seule pensée avait présidé à la création, comme une seule main à l'exécution de cet incomparable, chef- d'œuvre ; qu'aucune faiblesse ne se faisait voir nulle pari: ; enfin que s'il est rare de trouver un statuaire de génie, la raison ne [>eut admettre que douze pauvres et ignorants bergers, dont le talen;. d'ailleurs pouvait de nouveau être mis à l'épreuve, eussent eu le savoir et l'habileté néces- saires pour travailler une pierre informe et en faire jaillir un dieu. Le savant tint bon, et, rentré dans son cabinet, il fit un gros livre pour immortaliser les douze petits pâtres. L'idée était aussi absurde qu'injuste, son livre eut le plus grand succès.