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34 LES CHASSEURS DE RENNES. Elle avait le front largement développé, mais couvert d'une épaisse chevelure noire et fine qui lui tombait en désordre sur les épaules ; le visage d'un ovale magnifi- que ; le nez allongé et droit ; les yeux noirs, sombres, un peu sauvages ; la bouche bien modelée, les lèvres fortes et légèrement dédaigneuses, ce qui lui donnait une ex- pression générale d'intelligence et de résolution. Autant que j'en pouvais juger , sa taille devait dépasser la moyenne, et ses bras nus, où se dessinaient des muscles puissants, quoique arrondis en contours féminins, don- naient une haute idée de son tempérament énergique. Il y avait chez elle ce mélange de force et de finesse qu'on ne rencontre guère que chez les races indo-européennes les plus pures. Ses mains toutes petites se reliaient au bras par des attaches délicates, et son pied, qu'on pou- vait apercevoir à travers ses mocassins, n'eût point fait déshonneur à une parisienne. La fille du chef portait une robe de peau de renne, sans manche et sans taille, assez courte, atteignant à peine les genoux, et des jambières en peau, serrées par des cour- roies. Elle avait les pieds nus, dans de légers mocassins de cuir. Des canines de tigre, percées d'un trou à la ra- cine, et enfilées comme des grains de colliers, pendaient sur sa poitrine et faisaient étinceler leur émail sur sa robe. C'était sa seule parure. Je suis loin de recommander ce costume comme une toilette de haute élégance ; mais il y avait de l'ensemble et de l'harmonie dans tout cela, quoi qu'on en dise. — D'où viens-tu, me demanda I-ka-eh ? — Du Dix-neuvième siècle, lui répondis-je en me ser- vant des mots français, à défaut d'équivalents dans le jargon local. — Ouest situé ce village?