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300 LES CHASSEURS DE RENNES. I Etes-vous chasseur, cher docteur? Je ne doute pas que vous n'ayez eu en vous le germe de cette passion, cher- cheur et fureteur comme je vous connais ; mais l'amour de la science l'a probablement étouffé à sa naissance. Vous me dispenserez donc de vous dire par quelle suite de péripéties émouvantes je fus, il y a quelques jours, entraîné sur les pas d'un lapin, qui m'attira dans les ro- chers de Solutré. L'animal s'étant dérobé dans une cre- vasse, mon chien l'y suivit, et, pour attendre l'issue de cette expédition souterraine, je vins prendre gîte, à l'a- bri du soleil, dans une anfractuosité de la roche, précisé- ment à l'entrée du terrier de maître Jeannot. Solutré est un village des environs de Mâcon, un des plus riches de la basse Bourgogne, un des plus pittores- ques de France, à quelques portées de fusil de la vieille maison où je suis né et où je mourrai, s'il plaît à Dieu. C'est là que se récolte le vin de Pouilly, ce topaze liquide que vous appréciez, je crois. Une petite vallée y conduit, sinueuse, étroite, montante, couverte de pampres sur ses deux flancs, et ombragée de noyers. La vallée se termine par un amphithéâtre que domine un énorme rocher aigu, tranchant, escarpé à pic, dressé comme un gigantesque monolithe. Quelques maisons, des cubes de pierres grises, une vieille église bénédictine, s'accrochent aux flancs du rocher, qui les protège du vent du nord. Il y a dans tout cela un grand charme de fraîcheur et de sauvagerie, de simplicité et de grandeur. Au fond de la vallée, c'est l'oubli du monde v.i le repos sous les saules verts; sur le