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              UN HAIUÀGE SOUS LES TROPIQUES.            411

    — Et cet autre cavalier, ajoutait une jeune fille pres-
 que en rougissant, comme il est fièrement campé sur sa
 selle, et quelle douce langueur, en même temps, s'échappe
 de ses beaux yeux bleus !
    — D'où peuvent-ils venir? demanda un troisième. Ce
 n'est pas de Cbarcas, car la route est devenue impraticable
 depuis les dernières pluies, et lés chèvres ont peine à la
 gravir.
    — De Potosi, probablement, reprit le vieillard. On
 ni'assure que c'est le seul chemin que puisse prendre un
 voyageur pour atteindre notre vallée.
    — Pas davantage, vieux père, fit un nouveau venu, La
 côte est trop étroite pour que des mules si bien chargées
puissent y passer saines et sauves. A peine nos ânes avec
leur léger bagage abordent ces sentiers périlleux. Ces
voyageurs viennent d'en bas.
   — De Buenos-Àyres ?
   — Probablement, car leur costume n'est point celui de
nos frères de Saltaou Jujuy,ni même celui des harpies que
l'Espagne nous envoie sous le manteau des corrégidors !
   — Chut! jeune homme, reprit le vieillard. Vous vous
perdrez D. Fabio avec les étranges idées que vous avez
rapportées de vos voyages. Vous êtes le seul qui ait quitté
cette vallée paisible et osé descendre jusqu'à cette grande
ville de Buenos-Ayres, dont vous avez conté tant de
merveilles. L'Espagne est une marâtre, qui traite dure-
ment ses enfants, mais enfin nous avons du sang castil-
lan dans les veines, et si les colons n'ont pu faire valoir
leurs droits sacrés, c'est que notre auguste monarque
aura été trompé par les courtisans qui l'entourent. Soyez
prudent, D. Fabio, car je sais que le corrégidor a l'œil
sur vous, et votre témérité pourrait vous jouer quelque
mauvais tour.