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336           LE PAGE DU BARON DES ADRETS.

assez détruit ; sa contenance encourage les destructeurs
et son sourire a l'air de remercier ceux qui amoncèlent
les ruines.
    L'église, vaste et belle, faisait depuis deux cents ans
l'admiration de la contrée; les peuples l'avaient enrichie,
les pillards arrachent ou détruisent ses richesses. On
brise les reliquaires, on renverse les statues, on déchire
les tableaux; des forcenés s'élancent au clocher, en arra-
chent la croix qui s'élevait dans les airs et, après l'avoir
jetée sur la place au milieu de la foule, se mettent à dé-
 molir le clocher.
    Dans l'église était un christ gigantesque, oeuvre d'un
artiste croyant et objet d'une vénération profonde ; des
 mains impies l'abattent; on attache une corde aux pieds
 de celui qui sauva le monde, on ie traîne, on le promène
dans les rues en l'insultant, et arrivée sur les bords de la
 Coise, la foule hurlante jette ses débris souillés et muti-
 lés dans la rivière qui l'emporte loin de ces scènes de
 profanation.
    Mais Saint-Galmier n'était pas le but du voyage de
 l'armée. Loin, bien loin, s'aperçoivent, aux deux bouts
 de la plaine, deux villes célèbres; c'est là qu'on doit
 frapper les catholiques d'un coup qu'ils ressentiront dans
 toute l'étendue du royaume de France.
    A droite, là-bas au nord sur les bords de la Loire, est
 Feurs, une des plus anciennes et jadis une des plus
 vastes cités de la Gaule. Les Romains l'enrichirent de
 monuments superbes ; Feurs, centre d'un marché im-
 mense, n'avait de rivales que Narbonne, Arles, Vienne ou
 Aulun; plus tard sa grandeur s'éclipsa et Lyon devint