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384 LES FEUILLANS DE WON,
petite ville de Bourgogne , où ses premiers religieux se rassem-
blèrent , et il conquit une si grande autorité, qu'il fournit à l'É-
glise vingt-quatre papes, deux cents cardinaux, quatre cents
archevêques, sept mille évoques. Malgré cette réussite, ou peut-
être à cause d'elle, un certain relâchement s'introduisit dans
l'ordre, et, « à partir de ce moment, il sembla pencher vers cet
« affaiblissement auquel la richesse et l'orgueil de la puissance
« conduisent les familles, les institutions, les nations elles-mê-
« mes. » L'établissement de Cîteaux, dans le diocèse de Chalon-
sur-Saône, fut le résultat d'une protestation contre la décadence
de Cluny. Après une quinzaine d'années d'un succès douteux,
saint Bernard, en 1113, conduisit dans l'abbaye réformée trente
de ses compagnons, et le nouvel ordre prit aussitôt un grand
développement ; mais la sévérité des règlements dépassa les
forces humaines. « Aussi qu'arriva-t-il ? Un siècle ne s'était pas
« écoulé que Cîteaux tombait en pleine décadence. Ses abbés
« recherchaient la richesse, les honneurs. On reprochait aux
« cisterciens d'étendre démesurément leurs propriétés; le luxe
« de la table, des vêtements, des équipages, attirait la censure
« des papes (1). »
Le résultat de cette décadence fut la nécessité d'une réforme
qui eut pour instituteur dom Jean de La Barrière. Charles de
Crussol, fils du comte de Crussol, grand pannetier de France,
ayant embrassé le protestantisme , résigna au susdit, en 1502,
l'abbaye de Notre-Dame de Feuillans qui dépendait de l'ordre
de Cîteaux et se trouvait située dans les environs de Toulouse.
Ce nom de N.-D. de Feuillans provenait d'une image de la sainte
Vierge, placée au milieu du feuillage des arbres (2). Jean de la
(i) Citations empruntées à M. Roidot, dans son compte-rendu de l'His-
toire de l'ordre de Cluny, par M. Pignot. — Revue du Lyonnais, 3 e série,
t. vin, pp. 47, 50.
(2) J'ai trouvé celte étymologie dans les Tesori nascosti di lïonta, par
Ottavio Panciroli : « / monaci di tan Bernardo del ordine cisterciense, ri-
« dotti in Franeia all'antiquo rigore e stretezza di vita che osservb quel
t gran tervo di diot Fra Giovanni Berreria, nel monatiero di Santa