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DE L'HOMME L'homme n'existe pas dans le monde ; mais il y a des hommes. C'est qu'en effet les hommes diffèrent autant qu'ils se ressemblent, et qu'il n'y a pas de type commua dont on puisse dire : voilà l'homme ! — La masse du genre humain se divise en catégories ; et chaque catégorie, en individualités. Comme, d'ailleurs, chaque individu est triple, qu'il est intelligence, sentiment et volonté, et que la combinaison de ces éléments varie autant qu'il y a d'hommes, où serait l'homme ? — Je le répète, il n'existe pas. L'homme abstrait, qui n'a pas besoin de la société pour exister, n'est qu'une fiction ; cet être n'est pas seulement chimérique, il est impossible. L'être collectif, appelé l'homme, c'est l'humanité même: l'être individuel n'est qu'une portion de l'humanité ; mais chaque homme est un tout sacré dans l'humanité ; il n'est pas moins respectable, il n'est pas moins inviolable que l'humanité même. Il en est du rôle de chaque homme comme de son droit ; nul ne saurait exercer ni l'un ni l'autre, au détri- ment d'autres rôles et d'autres droits égaux ou supérieurs au sien. Chacun vit pour sa part virile, en quelque sorte, et au prorata des dons naturels ou acquis qui le distin- guent. Si l'individu prend trop de place dans la société, la so- ciété souffre ; si la société envahit l'individu, celui-ci souf-