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ÉTUDE SUR LE PATOIS LYONNAIS. 489 auxquelles se sont livrés dans ces derniers temps un si grand nombre de savants et d'habiles philologues, j'ai voulu seulement, ainsi que l'on a coutume de le dire, ap- porter, moi aussi, ma pierre à l'œuvre commune. Heureux si ce que je glane aujourd'hui dans le vaste champ mois- sonné par d'autres avant moi, peut contribuer pour quel- que chose à l'achèvement de l'œuvre nationale, (1) entre- prise à la fois et comme d'une commune entente, dans les localités les plus diverses de la France. J'ose espérer, en tout cas, qu'à défaut d'autre mérite, on voudra bien me tenir compte de mon zèle. Ainsi dans ce monde, les hum- bles, les petits préparent les matériaux que d'habiles ar- chitectes se chargent de mettre en œuvre ; de même que, du miel amassé par chaque abeille sur diverses fleurs, d'ha- biles ouvrières construisent ces beaux rayons dorés qui font les délices et l'ornement de nos tables. Les langues dans leur filiation, comme l'homme dont elles sont l'expression, ont un mouvement de croissance et de décroissance. Ainsi la langue grecque, souple, sonore, légèrement emphatique, rappelle admirablement une na- tion polie, délicate, enthousiaste , en même temps qu'elle se plie avec une facilité incomparable à toutes les exigences. Le latin, concis, nerveux, procédant d'une langue déjà très- perfeetionnée, a hérité en grande partie de ces qualités (2). Mais plus amoureux de la véhémence et de la précision que de la forme, il a en quelque sorte surenchéri sur la propriété des mots ; et, en supprimant l'article du substan- tif et les pronoms des verbes ; en évoluant, en matérialisant, en quelque sorte, les cas, il a rendu faciles et naturelles les (t) La langue d'un peuple, prise dans son dialecte ou jargon, est le mo- nument fondamental de toute histoire ancienne vraie. Pelloutier, Histoire des Celtes. (2) Romani, sermone, nec prorsùs barbaro, nec absolutè grceco, utun- tur, sed ex utroque mixto, accedente in plerisque ad proprietatem linguae Eoliœ. Dyon. Halicarn. Antiq. Rom. t. I.