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386 LE PAGE DU BARON DES ADRETS. peu derapporls avec eux, il ne les connaissait que trop. Il maudissait la fatalité qui l'avait jeté dans une si étrange position. Il pensait à ses premières années passées sous le toit paternel, à ses courses dans les montagnes, et il se promit dès ce jour de supplier son maître de le laisser rentrer dans sa famille. Bercé par ces douces pensées, il appuya négligemment sa belle tête dans sa main gauche, l'autre se porta sur sa petite épée et il sommeilla. Lorsque Cornes-du-Diable fut revenu à lui du fameux coup de poing que lui avait asséné le baron des Adrets, le plus fort de son armée après Bras-de-Fer, en cher- chant à se relever il trouva près de lui sa part du butin, cela le consola un peu des railleries de ses camarades, qui ne l'aimaient point à cause de son farouche caractère et de son insigne mauvaise foi. Dans cet instant, il enten- dit l'ordre d'évacuer l'église, et ne voulant pas recevoir une nouvelle correction pour désobéissance, il emporta vite son précieux trésor ; mais en sortant il jeta un re- gard de haine indicible aux religieuses. Mais si rapide que fût ce regard, un officier du baron l'avait remarqué. Cet officier profondément dissolu avait compris, dans le regard de Cornes-du-Diable, qu'il avait là un homme possédant les mêmes sentiments que lui, et sur lequel il pouvait compter pour les abominables projets qu'il avait conçus. Il suivit Cornes-du-Diable qui se rendait dans une petite ruelle, non loin de Saint-Jean, à l'auberge célèbre de la Moitié du Lapin ainsi nommée parce que la mère la Pipe, qui tenait l'auberge, donnait toujours une moitié de lapin savamment préparée aux épices. Aussi sa