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380            LE PAGE DO BARON DES ADRETS.

frémissante, était pareille à la bête fauve contemplant sa
proie avant de se jeter sur elle ; il fallait toute la craiate
qu'inspirait le baron des Adrets pour la contenir.
    Une femme , la plus âgée de ces martyres, se traîna
aux pieds du baron, et d'une voix qui eût attendri
les rochers, cria :
    —Grâce! la mort, la mort seulement ! nous l'implorons !
Au nom du Dieu des armées, si tu y crois encore, au
nom de tes filles, si tu as encore des entrailles, songe
que chaque enfant de ce troupeau qui était confié à
ma garde est une fille de chevalier. Donne-nous !a mort,
 mais laisse le blason de nos familles intact.
    Prosternée aux genoux du baron des Adrets, elle allait
les embrasser, quand Monlbrun. la repoussa du pied. Sa
tête frappa avec force sur la pierre et le sang inonda
son visage. Mais la noble et courageuse femme se releva
et implora encore. Le baron des Adrets était pâle et tour
à tour il regardait les religieuses et ses soldats. Un
sourire infernal plissa ses lèvres, et se secouant comme
 d'une étreinte invisible à laquelle il ne voulait pas suc-
comber, il se tourna vers ses soldats et leur cria d'une
 voix retentissante :
    — Soldats, prenez votre... Il allait achever, quand
 il rencontra le regard suppliant du page; la phrase
 expira sur ses lèvres. — Blancon, dit-il, c'est le jour
 où je suis généreux ; fais apporter ma part du butin ici.
 La grosse part du baron fut apportée. Puis se tournant
 vers ses soldats :
    — Voilà ma part du butin, elle est à vous. Et tendant
 sa main vers les religieuses :
    Voici la mienne»