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332               HISTOIRE LITTÉRAIRE DR LYON.

l'ornière mythologique, les premiers linéaments d'une poéti-
que indépendante.
   Ce développement était dans la nature des choses. De
nouvelles croyances devaient amener de nouveaux cadres de
la pensée. Malheureusement, cet essor littéraire de l'idée
chrétienne n'avait pas choisi, pour essayer ses ailes, une épo-
que favorable ; en débutant, il se trouva lancé dans un milieu
de complète décadence. A Lugdunum, comme dans toutes
les écoles de l'Empire, la littérature était aux précieux. Les
concetli, le jeu de mois, l'antithèse y régnaient, en maîtres.
Ce^n'était point la marche logique et régulière de la phrase
qu'ambitionnaient le poète et l'orateur, mais son effet préten-
tieux basé sur le choc bizarre des termes, ou calculé sur des
contradictions heurtées de raisonnement. A Cicéron avait
succédé Sénèque.oon le Sénèque des bons jours, mais le Sé-
nèque sacrifiant aux faux dieux des déclamateurs ambulants.
   Si jamais il y eut un sujet digne d'inspirer un prédicateur
chrétien, c'est assurément le martyre de sainte Blandine,
cette douce jeune fille se livrant a la mort avec tant d'intré-
pidité, de calme et de décence ; car, en face du supplice, elle
aussi, comme la vierge troyenne :
          ....   H de, xai Svvjaîtou; opoç
         noll-riv npovoiav, &yj.i Evojrtiptoç vsaeïv,
         Y.pVTà OUÇK « V|OU7TTS£V OjX^îCT   «jOcivcOV %p£ùiV.

                              ( E u r i p / E x a S , v, 568.)
        Elle tombe expirante, et. par un dernier soin,
        Elle rassemble encor la force qui lui reste
        Pour n'offrir aux regards qu'une chute modeste (1).
                                (Trad. de La Harpe),


   (1) La Fontaine, en décrivant la mort de Thisbé, d'après Ovide,
rend avec plus de concision la même idée :
        Elle dit, et tombant, range ses vêtements,
        Dernier trait de pudeur à ses derniers moments^