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330 HISTOIRE LITTÉRAIRE DE LYON. mons prêches a la gloire des martyrs lyonnais. Plein de pré- tention et visant sans cesse à l'effet, ce style offre, a chaque période, une antithèse dans les mots, une opposition dans les idées. Les rhéteurs de la décadence, Sénèque principale- ment, dont il admet des phrases entières, sont les modèles qu'il imite de préférence. Ce qui est plus grave, il abonde en définitions subtiles et pour ainsi dire physiques des saints mystères, genre d'interprétation téméraire, a qui l'incarna- tion divine servait le plus habituellement de thème, fort à la mode alors, mais formellement réprouvé par la ferme et droite raison de saint Eucher, comme le démontre un passage de ses homélies que nous a conservé Claudien Mamert (1). Ce fragment, que ne donnent ni Schot ni Leriche, roule précisément sur le mystère de l'incarnation. Le voici, tel que le traduisent les PP. de la Congrégation de Saint-Maur : « Quelques curieux cherchent des raisons touchant un mystère qui s'est accompli une fois, et voudraient savoir comment Dieu et l'homme ont pu s'unir ensemble , eux qui ne sauraient s'expliquer ce qui se fait tous les jours, je veux dire comment l'âme s'unit au corps. Assurément, il est bien plus aisé que deux choses spirituelles, telles que sont Dieu et l'âme, s'unissent ensemble pour composer le Christ, qu'une substance incorporelle s'unisse à une substance cor- porelle pour composer l'homme. De même donc que l'âme s'unit au corps pour lormer un homme, de même Dieu s'esl uni a l'homme pour faire le Christ (2). » Ainsi, sainl Eucher serait aussi étranger à la composition des deux homélies sur les martyrs lyonnais qu'à toutes celles qui les accompagnent dans les recueils. Force est donc d'en laisser, avec Ampère, toute la responsabilité à l'évêque gau- lois Eusèbe. (1) De anim., lib. Il, cap. 5. (2) Hist. littér., II, 290.